- mielpops
- Localisation : Midi-Pyrénées
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Date d'inscription : 12/09/2014
Sacrée journée ! (récit court)
Sam 13 Sep - 13:00
Je suis au bord de l'implosion. J'ai attendu cet instant des semaines durant et le jour J est enfin arrivé. Je me réveille. Autant dire que j'ai passé une nuit blanche. J'ai compté les moutons, que dis-je des troupeaux entiers des heures durant et ce n'est qu'aux premières lueurs du jour levant filtrant au travers des volets de ma chambre que Morphée est venu me prendre. Il est 11h45..et.. oh mon dieu.. mon train part dans moins de deux heures ! Ma valise n'est pas encore tout à fait prête, je dois me doucher, prendre mon petit déjeuner/ déjeuner, prendre ma voiture et filer à la gare. J'ai plutôt intérêt à accélérer le rythme !
Je me lève d'un bon, les yeux encore gonflés de sommeil. J'envoie d'un seul geste la couette au fond du lit, elle retombe mollement sur le parquet. Une pensée, idiote je l'avoue, me vient alors en tête : heureusement que j'ai fait le ménage hier !! Oui, logique, je pars pour une semaine et je n'ai pas envie de retrouver l'appart en vrac à mon retour.. Je n'aurai pas la force de m'y mettre, puisque, je le sais déjà, mon esprit sera rempli d'elle et de ces jours passés auprès elle.
J'ignore comment va se passer notre première rencontre mais je sais déjà que ce sera merveilleux. Les mois passés à se parler tous les jours via internet, les mails, les textos, les conversations téléphoniques.. Ah mon dieu, sa voix, cette putain de voix qui me charme tant et me laisse songeuse. Son sourire me transcende et m'envoie direct au nirvana. Je suis folle dingue d'elle , même si je ne l'ai encore jamais vue en vrai, mais rien à fiche, je sais que ce que je ressens est bien réel.
Hop, je reprends mes esprits, je n'ai pas le droit d'être en retard et de rater ce fichu train qui me mènera à elle.
J'ouvre en grand les robinets de la douche et je n'attends pas qu'elle soit à la température désirée. L'eau est glacée. C'est ce qui s'appelle, au sens propre, prendre une douche froide. Effet immédiat garanti, mes yeux s'ouvrent d'un seul coup et ma bouche s'ouvre en cœur sous l'effet de surprise. Je temporise aussitôt manière de ne pas me transformer en bloc de glace. L'eau redevient vite agréable et je me laisse envahir par un profond bien être alors que des milliers de cristaux chauds à souhait se déversent sur mon corps.
La douche prise, je me précipite vers la cuisine. Dieu merci, il reste assez de café pour pouvoir prendre un petit déjeuner digne de ce nom, beurrer quelques tartines que je ne manque pas de charger plus que de raison de confiture de fraise. Oui ! j'adore la confiture de fraise, et alors ?? La sonnerie stridente du micro onde m'annonce que mon café est prêt juste au moment où mes tartines sont prêtes.. Question timing, je ne pouvais faire mieux.
Je me sers un grand verre de jus d'orange... rien ne vaut celui que l'on se prépare soi-même, pas vrai ? Le moment du petit déjeuner est pour moi un instant sacré. Je me délecte de la senteur de l'arôme qui se dégage du précieux liquide noir et qui envahit tout l'appartement. J'ai décidé de ne pas faire griller mes tartines cette fois-ci. Cela aurait été une perte de temps et j'aurais du, nettoyer l'appareil et les cochonneries qui découlent de ce type d'opération. Ma maniaquerie m'aurait poussée à tout remettre en ordre, et là, je ne peux me le permettre. Trop pressée. Le café inonde mon palais de son goût si particulier et si délicieux. Surtout sans sucre, il est bien meilleur. Oui, je sais ce que vous allez me rappeler à l'ordre avec mes tartines. Ce n'est pas par crainte de prendre du poids, mais juste une question de goût, j'insiste. J'ai très faim et j'engloutis mes tartines. Je contrôle l'heure sur la pendule murale. 12H15. Je suis encore dans les temps. Soudain, je pense à elle. Seigneur, je n'ai pas regardé si j'avais des messages sur mon téléphone. Où est ce fichu appareil ? Je cherche partout dans la cuisine, je passe à la salle de bains et réalise qu'il est resté dans la chambre. Oui, mais où ? Je ne le vois pas à sa place habituelle. Je panique un instant, puis, sourire aux lèvres, je me souviens m'être endormie avec. Le soir, dès qu'elle s' endort, j'aime lire tous ses messages avant de la rejoindre au pays des songes, regarder son doux visage. Je m'en saisis et mes yeux fixent l'écran, ronds comme des billes. J'ai reçu pas moins de 30 textos.. 1 de maman, 5 de ma meilleure amie, 24 de Justine. « « Coucou mon amour, bien dormi ? » ». « « Hâte de te serrer dans mes bras. Le temps va me paraître bien long avant que tu ne sois là » ». « « Chérie?Tu dors toujours ? N'oublie pas, tu as un train à prendre ! » ». « « Sand, qu'est-ce-que tu fabriques ? » ».. « « Tu dors toujours mon ange ? » ». « « hey réveille toi mon coeur » ». « « Tu me manques tant » »... Telle que je la connais, elle doit être dans tous ses états et je la comprends, ça fait plus de deux heures qu'elle attend ma réponse. Je m'empresse de lui répondre : « « Bonjour mon amour. Je suis prête, je file à la gare. Ai passé nuit blanche. Viens juste de me réveiller. Tu me manques. Je t'aime chérie. Hâte de te serrer contre mon coeur» ».
Je lave mon mug, ramasse les cochonneries sur la table et file à la salle d'eau pour rafraîchir ma bouche et faire ce que j'aime à appeler « un ravalement de façade » : un peu de mascara pour ressortir le vert de mes yeux, un peu de fard à joues pour rehausser mon teint peau de pêche et un gloss discret. Je déteste ressembler à un pot de peinture et loin de mois l'envie de faire de la publicité pour Ripolin.
Hop, j'éteins la lumière, ciao salle de bain ! Je fais le tour de l'appartement, ferme tous les volets... oh zut ! La valise ! Je n'ai pas terminé ma valise ! Hop, direction la chambre, les talons font un bruit d'enfer sur le plancher.. Ce sont les voisins du dessous qui vont être contents.. Il ne me reste que quelques bricoles, des dessous, un petit caraco qui a séché cette nuit et auquel je tiens et qu'elle adore, mon veston en toile et hop, mes affaires de toilettes, dentifrice, brosse à dents, maquillage, parfum et le tour est joué.
13h15. Le train part dans une demie heure, j'ai intérêt à appuyer sur le champignon si je veux être dans les temps. Ceci dit, je n'ai que dix minutes de trajet, mais c'est à dix kilomètres de chez moi. Et oui, depuis qu'ils ont décidé de l'arrêt unique des TER, il me faut aller à la gare de la ville la plus proche.. J'espère juste que la route sera dégagée et que je n'aurai pas à subir l'opération « mille pattes » des bus qui pullulent dans la région pendant les vacances d'été. Je rêve alors, secrètement, à une voiture avec des ailes comme dans taxi 3 ou à celles, plus rigolotes, aux roues télescopiques qui permettent de passer par dessus les escargots des routes.. Gogo gadget aux roues.. il y a un peu d'inspecteur gadget qui sommeille en moi.. Je me marre toute seule et mes voisins ne manquent pas de le remarquer alors que je descends les escaliers. Heureusement que je n'habite qu'au second étage, je me demande comment j'aurais fait pour descendre une valise digne d'un départ pour le pôle nord.. L'ascenseur ? En panne, comme d'habitude. La petite mamie adorable du troisième qui m'invite souvent à boire un thé chez elle va trouver mon absence pesante.. Je l'ai prévenue de mon départ, je ne pourrai faire ses courses ou l'emmener pendant sept jours. J'espère qu'elle aura trouvé une solution. Cette charmante dame n'a pas son pareil pour mitonner un bon bœuf bourguignon qu'elle aime à partager avec moi dès qu'elle en prépare un. Il se dégage alors une odeur dans tout l'immeuble, je ne vous raconte pas.. Rien que d'y penser, j'en ai l'eau à la bouche.. Bon, Sandra, concentre toi, tu viens de déjeuner, non mais c'est quoi cette histoire, tu es un vrai estomac sur pattes ma parole !!
Oups, mes clopes.. j'ai oublié les clopes.. ah non, ça, impossible de partir sans mes clous de cercueil. Nerveuse comme je suis, il me les faut, il n'y a pas d'ultimatum ou je me transforme en croquemitaine et avec les quelques sept heures de train qui m'attendent, il est impensable que je m'en passe au risque de me retrouver en état de choc. Oui, je sais, il est interdit de fumer dans les trains, mais je resquille en allant m'en griller une entre deux compartiments. Fausse alerte, elle sont dans mon sac. Un paquet tout neuf dont l'espérance de vie ne dépassera pas la journée. Et la tablette ! Zen ! Elle t'attend dans la boite à gant de la voiture Sandra ! Tu l'y as mise pour ne pas l'oublier.. A ce moment même, je bénis le « au cas où ». Je n'aurais pu remonter aller la chercher.
13h20. Je soulève la valise pour la mettre dans le coffre.. Mais j'ai mis quoi là-dedans ? Des pierres ? Elle me semble très lourde tout d'un coup. Et en plus, depuis quelques dizaines de mètres, elle n'a cessé de partir dans tous les sens. Allez, un effort ma grande, tu vas y arriver.. Concentre toi, mais ne t' énerve pas.. Quoi que, la montée d'adrénaline ne me fera pas devenir toute verte, même si j'en ai besoin à ce moment précis. Monsieur Hulk, s'il vous plaît.. un petit coup de main ne serait pas de refus ! Je me concentre, attrape le fond de la valise et la soulève pour, enfin la mettre dans le coffre. Et là, je vois pourquoi ma valise s'était mis en tête d'imiter les crabes : j'ai perdu une roulette en cours de route ! Pas le temps de partir à sa recherche, je me débrouillerai quand j'arriverai et mettrai Justine à contribution.
Enfin derrière le volant, j'insère la clé et mets le contact. Rien. J'aurais compris que titine me fasse un caprice en hiver, mais en plein mois de juillet, il n'y aucune raison. Un souffle plus tard, je remets le contact. Titine a décidé de m'embêter aujourd'hui. Je connais cette putain de voiture comme si je l'avais faite puisque je l'ai donnée à mon frère qui me l'a prêtée car ma twingo dont j'ai explosé le compteur, est au garage. Je fais une nouvelle tentative. Rien. Mais c'est quoi ce plan, merde ! Tu vas pas me faire le coup de la panne ! Non pas maintenant hein ! Saloperie de voiture !! Il est 13h25. Je commence à paniquer lorsque, soudain, la réponse au problème surgit des profondeurs de mon cerveau en ébullition. Le coupe-circuit ! C'est vrai ! Je n'y ai plus pensé et ça n'est pas faute à mon frère de ne pas l'avoir dit ! Sous le siège, je trouve la source de tous mes malheurs et fait pivoter sans douceur la vanne quart de tour. Je mets le contact et oh, miracle, le moulin se met à tourner.
Je me dis qu'à cette heure ci, tout le monde finit de déjeuner et que les rues seront dégagées. Marche arrière d'enfer, dans une nuage de poussière qui englobe les pauvres gamins qui jouent dans le bac à sable du terrain de jeu, juste derrière moi. Première, et hop, c'est parti mon kiki.Je parcours une cinquantaine de mètres, personne, je grille le stop et me voilà sur la route principale. Virage à droite, et direction la gare. Je ne me suis pas trompée, il y a peu de trafic et je pense que je vais être dans les temps. Il le faut, c'est une question de vie ou de mort.
13h30, je suis sur la nationale, j'ai encore un quart d'heure devant moi. La gare est à l'extérieur de la ville, j'ai mes billets de train, commandés sur internet, que je n'ai plus qu'à composter, c'est tout bénef. Je prie Saint-Christophe pour ne pas aller faire un tour dans les décors et pour que la route soit dégagée de tout véhicule susceptible de me gêner pendant le trajet.
Gentil petit Christophe exauce mes prières et il ne me faut que cinq minutes pour parvenir à destination. Une place de parking me tend les bras, je m'y engouffre. Je descends à toute vitesse, récupère la valise tant bien que mal et ferme le 4x4. Toi, et ton coupe circuit, je te retiens !
Je fonce à l'entrée de la gare, traverse le hall en un coup de vent et composte mon billet avant de me précipiter sur les quais. Un coup d'oeil rapide sur les écrans et je repère la voie où mon train m'attend. Quai A, super, je n'ai pas à aller bien loin. Je repère mon wagon et m'y engouffre aussitôt. Les portes automatiques se referment derrière moi. Il était moins une ! Le lourd convoi se met à trembler et démarre. Je souffle un bon coup et avance dans l'allée, à la recherche de la place qui m'a été assignée. Je déambule tant bien que mal avec ma valise à roue unique et arrive à mon siège. Je me félicite intérieurement lorsque je constate qu'il s'agit d'un coin à quatre places, je pourrai ainsi étaler mes jambes. Mais un souci se pose à moi. Il me faut mettre la valise sur le porte bagages dans le rail du dessus et je sens que je suis mal barrée. A bout de souffle et de force après ce marathon express, je vais m'en voir des pierres. Prenant mon courage à deux mains, je me lance dans l'aventure. Cette valise est décidément trop lourde, jamais je n'y arriverai. Me voyant dans la difficulté, une bonne âme agrippe ma valise et de ses bras saillants, hisse le lourd fardeau jusque dans sa place. Un homme d'une trentaine d'années, certainement un adepte de la muscu a volé à mon secours, et vu son sourire et la façon dont il me dévisage, il mise sur sa plastique pour me faire du gringue. Je le remercie gentiment et m'installe enfin. Je mise sur la disparition immédiate, comme par un tour de magie, de la disparition du monsieur, mais je réalise que je vais devoir supporter sa présence lorsqu'il s'assoit juste en face de moi, un sourire d'abruti sur son visage ingrat. Je sens que ça va être folklo. Petit Jésus, faites qu'il descende au prochain arrêt ou ça va pas le faire. Vu l'éclair d'intelligence que je devine dans son regard et les pensées qu'il anime tant il est fin, je sens que je vais passer un bon moment..
Avant que ce monsieur n'entame une conversation que je sens lourdingue, je plonge la main dans le sac – l'expression la plus correcte serait foutoir - et en ressors la tablette que j'ai manqué d'oublier dans la boîte à gants. J'attrape mes oreillettes, les branches, les colle dans mes oreilles et l'allume. La lecture ne me tentant pas pour le moment, j'opte pour un film.. Mais lequel ? Je prends mon téléphone et compose le numéro de ma chérie qui doit être encore en pause. J'ai trop envie d'entendre sa voix. Elle ne va pas tarder à reprendre, mais ces quelques minutes passées avec elle me feront un bien fou avant d'affronter les 700 km qui me séparent d'elle. Je compose son numéro que je ne connais que trop bien et je n'ai même pas le temps d'entendre les sonneries qu'elle décroche déjà. C'est fou ce que le type en face moi est discret, je le vois tendre l'oreille. Toujours ce sourire d'arriéré aux lèvres.
« Coucou mon amour ! M'entends -je dire de cette voix qui me laisse à chaque fois sur le carreau
- coucou ma chérie ! » Je la tiens ma solution ! Si ce gars comprend que je suis lesbienne, il me foutra peut-être la paix. Je hausse le ton pour être sûre qu'il entende bien.. au risque que tout le wagon en profite.
- Ca y est, je suis dans le train.. J'ai failli ne pas arriver tu sais. Désolée, je n'ai même plus eu le temps de t'envoyer de message, ça s'est joué à la minute près ! Tu vas bien ?
- Ca ira mieux quand tu seras là. Je ne tiens plus en place mon ange. Je sais pas comment va se passer cet après midi, mais ça risque d'être long et moi d'être intenable !
- Il va falloir rester zen ma chérie sinon, tes élèves vont te prendre pour une dingue !
- Dingue de toi oui ! Dépêche toi d'arriver !
- Tu veux que j'aille demander au conducteur d'aller plus vite et de ne pas s'arrêter dans les gares ma chérie ? » Je l'entends rire à l'autre bout de l'appareil et elle reprend sur un ton beaucoup plus sérieux que le mien.
- Hâte que tu arrives, j'ai tant envie de te serrer dans mes bras.
- .. et moi de poser mes lèvres sur les tiennes chérie. »
Nous échangeons encore quelques minutes et j'entends la sonnerie annonçant la reprise des cours, ce qui met fin à notre conversation. Le sourire sur le visage du gars s'est figé et son regard est devenu interrogateur. De but en blanc, il s'adresse à moi.
« C'est votre petite copine ?
- Oui ? Pourquoi ? Ca vous dérange ?
- Non non, mais je me suis toujours demandé comment des femmes peuvent aimer des femmes
- Ou plus directement, comment on peut se passer des mecs, dites le.
- Oui, si on veut.
- Vous pensez sincèrement que votre outil est l'instrument sine qua non pour procurer du plaisir à une nana ?
- Oui, si on veut.
- Donc, vous êtes du style à rentrer dans le jardin et labourer sans avoir pris soin de préparer le terrain..
- Oui, si on veut répond il de son air abruti. La teub, ya que ça de vrai. Les nanas ne peuvent pas se passer de la mienne. Un vrai braquemard. Lance t il en éructant bruyamment.
- Et vous croyez que parce que la nature vous a doté d'un attribut conséquent, vous allez me convertir ? Beurk, ce type est franchement dégoutant.
- Oui si on veut. Je ne perds pas espoir.
- Et bien, vous vous fourrez le doigt dans l'oeil. - mon dieu, que n'ai-je pas dit et il répond du tac au tac.
- Ta copine te l'y met bien, pourquoi je tenterais pas ?
- Aucune chance ! » Vu les relents qui m'arrivent au visage alors qu'il se frotte la panse tout en éclatant de rire, je devine que ce gars n'a pas bu que de l'eau au déjeuner.
La discussion prend une tournure qui me déplaît. Je ne sais plus comment réagir face à cet individu. La probabilité veut que j'avais une chance sur 500 de tomber sur un type de cette trempe, j'ai trouvé le moyen d'y tomber dessus. Je coupe court, ne prend même plus la peine de lui prêter la moindre attention et me concentre sur la tablette.
« Tiens, un petit « Armagedon » avec Bruce Willis. J'ai déjà vu ce film des dizaines de fois mais je me régale toujours autant à chaque fois.
« Je peux regarder avec vous ? - Mon dieu, il revient à la charge ! Mais quel gros naze !
- Non, la tablette n'est pas équipée pour une seconde paire d'écouteurs.
- Allez quoi.. ! Je me mets à côté de toi et tu mets le son à fond !
- Bon, ça suffit maintenant. Foutez moi la paix. Cuvez votre bière et allez voir ailleurs si j'y suis !
- Oh, t'es pas sympa toi ! T'as pas une petite envie là ? T'as pas envie d'un petit calin ? Si, je suis sûr que si.. Allez, fais pas ta mijorée ! »
Le type parle à voix haute et commence à s'énerver. Tant et si bien que tout le wagon est ameuté ; Je ne sais plus où me mettre. Les passages commencent à chuchoter et à regarder dans notre direction, d'un œil pas tout à fait clément. Le gars se lève et vient s'installer à côté de moi, non, se coller à moi avant de commencer à me peloter. Contre la fenêtre, je n'ai aucun échappatoire. Quelle journée de merde !! Mon téléphone se met à vibrer. Je lis sur l'écran « Mon amour ».
« Encore elle ? Elle peut pas te lâcher la grappe ? Allez, viens, on va s'amuser tous les deux ! »
Ca devient franchement insupportable. Je me dis que j'aurais du laisser la valise dans l'allée . Là, je suis sûre qu'avec l'adrénaline qu'il m'a fait monter, j'aurais eu la force de l'attraper et de la lui balancer dans la tronche.
A cet instant, un homme en uniforme s'approche de nous et s'adresse à la sangsue puante juste à côté de moi.
« Monsieur, veuillez me suivre s'il vous plaît.
- Bah non pourquoi ? Je suis très bien où je suis !
-Votre comportement perturbe les passagers et surtout Madame. Je ne le répeterai pas deux fois.
-Ok, c'est bon, j'arrête ! Je recommencerai pas, promis !
- Veuillez me suivre, j'ai dit. »
Le pochetron n'a pas le temps de dire ouf que deux bras puissants l'arrachent de son siège et l'invitent sans douceur à se diriger vers la porte de sortie. L'homme en uniforme aux couleurs de la compagnie des chemins de fer s'enquiert de mon état et entraîne mon agresseur sexuel imbibé hors de ma vue. Et bien, mon voyage commence bien ! J'en suis toute retournée. Je me jette sur le téléphone et réponds au message de Justine. J'omets de lui parler de l'incident, de peur de l'inquieter. Je vais en avoir des trucs à lui raconter !! Ils laissent monter n'importe qui la SNCF ! Je me remets peu à peu de mes émotions et me reconcentre sur ma tablette, espérant que le reste du trajet se passera sans encombre. J'ignore ce qu'ils vont faire de lui et ce qui va lui arriver, mais c'est le cadet de mes soucis !
Dieu que le temps passe lentement ! Les deux heures que durent le film m'ont bien aidée mais je ne suis pas encore à la moitié du voyage. Justine va bientôt quitter le lycée où elle enseigne et s'appreter à venir me récuperer à la gare. Je l'imagine alors en train de se pomponner, d'hésiter sur sa tenue vestimentaire, regarder l'heure toutes les 30 secondes comme si elle faisait une course contre la montre.. je la vois arranger son appartement.. si si, plus maniaque que moi, ça existe. Je ferme les yeux et visionne notre rencontre. Je me laisse bercer par les légeres secousses sur les rails et peu à peu, l'image de ma dulcinée m'apparaît. Splendide, sa blonde chevelure et son sourire enjôleurs et ses yeux si expressifs mais si rigolos quand ils s'amusent à balayer l'espace. D'ailleurs, je la taquine assez souvent à ce sujet. Je la vois s'animer, s'approcher de moi, mains en avant, elle vole dans l'espace de mon rêve, car, oui, je finis par m'endormir du sommeil du juste.
« Well, you can tell by the way I use my walk, I'm a woman's man: no time to talk. Music loud and women warm, I've been kicked around since I was born. And now it's all right. It's OK. And you may look the other way. We can try to understand the New York Times' effect on man. » (Oui, tu peux le voir rien qu'à ma façon de marcher, Que je suis un homme à femmes : pas de temps pour parler. La musique est forte et les femmes sont chaudes, j'erre sans but depuis ma naissance. Et maintenant tout va bien, c'est bon.Et tu peux faire semblant de ne pas remarquer. Nous pouvons essayer de comprendre l'effet du New York Times sur l'homme.
Hein, quoi ? Qu'est-ce-que c'est ?? Les Bee Gees dans le train ? Y'en a un qui est revenu d'entre les morts ou quoi ? C'est quoi ce traquenard ?? Je me laisse entraîner par la mélodie de « Saturday night fever » encore quelques instants avant de réaliser que c'est mon propre téléphone qui sonne.
« Mon cœur ?
- Oui chérie.
- Qu'est-ce-qui se passe ? Je t'ai envoyé plein de textos tout mimis et tu as pas répondu, tout va bien ?
- Oui, heu, désolée, je m'étais endormie.
- Je crois que j'ai eu le nez fin de t'appeler, tu descends à la prochaine station..
- Oh punaise.. oui, tu as bien fait. J'ai bien failli atterrir à Pétaouchnok ! Merci mon amour.
- Ah, qu'est-ce-que tu ferais sans moi !!
- Rien, je ne suis rien sans toi ma chérie. Je t'aime tu sais.
- Tu as du me le dire un million de fois mais j'adore te l'entendre dire bébé.
- Et j'adore te le dire chérie.
- Allez, je te laisse.. et n'oublie pas de descendre au prochain arrêt ma belle au bois dormant.
- Oui, à tout à l'heure chérie. Je t'aime
- Moi aussi je t'aime. Bisous »
Une demi heure et 21 textos plus tard, mon train arrive enfin à destination. L'entrée en gare se fait à une lenteur insupportable. Mon Dieu, elle est là, elle m'attend.. Ca va ? J'ai pas trop l'air endormi ? Et mon maquillage, j'espère que c'est pas les montres molles de Dali.. Pas envie de lui faire peur à Justine. Les mètres sont comme des kilomètres.. Ils font une opération escargot ou quoi ? Et l'autre derrière, celui qui a ronflé en début de trajet, il me souffle dans le cou. Comme s'il faisait pas assez chaud ! Ha, je déteste ça !
Dans un dernier grondement infernal et un bruit métallique, le convoi s'arrête enfin. Les portes s'ouvrent, enfin, un peu d'air ! Et une urgence à satisfaire.. ou plutôt deux ! Je descends enfin, heureuse de respirer l'air extérieur. Je m'étire et balaie la gare du regard. Je repère l'escalier qui me mènera au hall où elle m'attend. La vache ! Ils auraient du le faire encore plus haut ! Comme si j'avais pas fais assez de sport aujourd'hui ! Mais elle est là et je monterais à reculons, à cloche pied et les yeux bandés s'il le fallait. Je prends mon courage à deux mains.. Je devrais rajouter les pieds et les jambes, parce qu'il va falloir les monter toutes ces marches !
Je m'approche, prends une grande inspiration et je me lance.. avec cette satanée valise. Mon cœur bat la chamade, j'ai l'impression qu'il va sortir de ma poitrine. Je sais qu'elle est là, qu'elle m'observe mais moi, je ne parviens pas à la voir au travers des immenses vitres teintées. Comment me trouve-t-elle ? Est-ce que je ne vais pas la décevoir ? Je fais quoi, un bisou sur la joue ou je l'embrasse ? Est-ce que je suis bien habillée ?
Mine de rien, je suis déjà en haut. Un escalator et une porte me séparent d'elle. Ca se voit que je suis nerveuse ? C'est pas un cœur qui bat dans ma poitrine, c'est tout un défilé de chars d'assaut du14 juillet ! Me voilà au bout de l'escalier mécanique, plus que quelques mètres à franchir pour parvenir jusqu'à la porte et... merdum, qu'est-ce-qui se passe encore ? Ma valise ne veut plus suivre. Elle est prise dans les dents des marches de métal. Je me débats, rien à faire, elle résiste. Je tire un coup sec et je réussit à la dégager et là.. je déplore la perte de la seconde roue. Il ne me reste plus qu'à porter a mano ce lourd fardeau. J'espère que Justine n'a rien vu, mais j'en doute. Et mes craintes sont fondées lorsque, à travers les vitres, je vois un joli croissant de lune blanc s'agrandir. Justine se paye ma tête.
J'ouvre la porte et... elle est là. Je plonge mes yeux dans les siens, on se dévisage du regard, regard pétillant, regard heureux, regard débordant de bonheur, regard rayonnant mais aussi intimidé.
« Salut ma chérie
- Bonjour toi !
- Qu'est-ce-qu'elle t'a fait cette pauvre valise.
- Elle s'est battue, elle a perdu.
- Tu as fait un bon voyage ?
- Long mais ça en valait la peine. »
Nous tombons dans les bras l'une de l'autre et nous nous serrons très fort, les larmes aux yeux. Son odeur de vanille me transporte, son corps contre le mien, enfin, m'emmène dans un pays magique.
« Tu viens ? La voiture est pas loin.
- Heu, il faut que j'aille saluer Madame Pipi, je ne tiens plus là.
- Ok mon cœur, viens, c'est par là.. »
De Madame Pipi il n'y a pas, ni même personne d'autre d'ailleurs. Justine me prend dans ses bras, son regard infiniment doux m'enveloppe et mes jambes se transforment en guimauve lorsque pour la première fois, nos lèvres se scellent. L'endroit n'est pas l'idéal, mais personne ne viendra nous embêter. Au diable le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse. Je lui rends son baiser et serre ce corps encore plus fort contre le mien, ce cors que j'ai tant caressé du regard.
« Si tu savais combien j'ai attendu ce moment mon ange !
- Oui, car je l'ai attendu autant que toi. Enfin, je peux te toucher et t'embrasser.. C'est juste.. magique. »
Nous nous dirigeons d'un pas rapide vers la sortie, puis jusqu'à sa voiture garée non loin de là. Je m'en réjouis. Déjà, de grosses gouttes d'eau commencent à tomber et des éclairs zèbrent le ciel. Le vent se lève, un gros orage s'annonce. En fait non, il est déjà dessus. Le temps que l'on arrive à la voiture, on prend la saucée. On balance la valise dans le coffre et on s'engouffre dans la voiture, trempées comme des soupes.
On se regarde, on éclate de rire avant de se donner un baiser langoureux, puis un autre, et encore un autre.
« On reste là où on va déguster le bon repas que je nous ai préparé ? M'interroge-t-elle.
Attends encore un peu. Approche toi. Je n'ai pas encore reussi à déterminer le goût de ton rouge à lèvres. »
Nous voilà parties, direction son appartement situé à quelques kilomètres de là. Elle est concentrée sur la route. Les essuie glace ne vont pas assez vite pour chasser l'eau qui tombe à présent en trombes. Je caresse sa joue du dos de la main, elle tourne un peu la tête et embrasse mes doigts.
Pour notre plaisir, on prend tous les feux rouges auxquels on patiente en se dévorant le visage.
15 feux plus tard, on est arrivées. La pluie ne s'est pas calmé, ça pète de partout. On va encore prendre une douche forcée. Mais on la prendra à deux. On investit rapidement l'entrée de l'immeuble et fonçons comme des fusées jusqu'à l'ascenseur qui devient à son tour le témoin privilégié de notre amour.
Ca y est, la porte se ferme, nous voilà seules, et au sec.. Nous nous jetons dans les bras l'une de l'autre et laissons parler nos sentiments, nos envies. Nos mains se touchent, se caressent, s'étreignent, parcourent nos corps respectifs alors que nos lèvres se scellent dans un long et voluptueux baiser. Nous nous déshabillons respectivement et elle m'entraîne à la salle d'eau où une douche bienfaitrice nous accueille. On y est un peu à l'étroit mais pas grave, on est collées l'une à l'autre et le contact de nos peaux nous électrise. Nous continuons nos étreintes, nos baisers à en perdre haleine. Nos lèvres ouvertes se cherchent et se trouve pour se perdre à nouveau. Nous avons si soif l'une de l'autre qu'il nous faudra boire l'une de l'autre encore et encore pour l'étancher. L'eau est divinement chaude, mais la température monte très rapidement. Nous ne formons plus qu'une. Puis soudain, un cri en stéréo résonne dans la pièce.
« Putain, mais c'est pas vrai ! Le cumulus déconne encore ! Je vais tuer le proprio, ça fait deux mois que je lui dis qu'il foire et il a toujours pas bougé son gros cul. Je suis désolée mon amour. Viens, allons nous sécher » Je la regarde, elle me regarde. On éclate de rire. On sort de la douche, et on se sèche tendrement en se donnant des bisous à tout va. Il fait meilleur tout à coup. Je vais jusqu'à ma valise, restée au milieu du couloir et attrape de quoi me vêtir.
« Tu as faim mon ange ?
- Oui, de toi.
- Je serai ton dessert si tu le veux bien. Allez, on va se restaurer, et j'ai une envie monstre que tu me racontes tes péripéties.
- Je sais pas ce que tu as préparé, mais ça a l'air bon » dis-je alors qu'elle apporte un plat bien garni.
- Rien de particulier, je suis une piètre cuisinière. Je me suis pas trop cassée la tête
- Arrête, je te crois pas. Je suis sûre que c'est très bon. Tu as fait quoi ?
- Des brochettes campagnardes : tomates cerises, olives noires, cubes de fromage, rosette, coeurs de palmier et des petits morceaux de pain aillé grillés. C'est tout.
- C'est tout ? Mais y'en a pour un régiment ! Et en plus j'adore ça. Merci ma chérie. Ah ! Et heu.. n'oublie pas ta promesse !
- Quoi donc ?
- Pour le dessert !
- Tu perds pas le nord toi !!!
- Jamais. »
Elle me sert un petit vin rosé bien frais. Elle n'a pas oublié ma préférence pour les vins, elle est adorable. Puis se sert à son tour. Nos verres se cognent et nous buvons une gorgée après avoir entrecroisé nos bras. Et à ce moment crucial, qui donc trouve le moyen d'avaler son rosé de travers et manque de s'étouffer ?
Justine trouve immédiatement les gestes rassurants en posant mon verre et en m'aidant à rétablir l'ordre dans mon organisme. Mais je ne renonce pas pour autant à goûter à ce délicieux nectar. Elle me tend mon verre avec son sourire inimitable et s'approche de mon visage afin de m'offrir ses lèvres..
J'ai faim.. très faim.. qui vais-je déguster en premier ?
Je me lève d'un bon, les yeux encore gonflés de sommeil. J'envoie d'un seul geste la couette au fond du lit, elle retombe mollement sur le parquet. Une pensée, idiote je l'avoue, me vient alors en tête : heureusement que j'ai fait le ménage hier !! Oui, logique, je pars pour une semaine et je n'ai pas envie de retrouver l'appart en vrac à mon retour.. Je n'aurai pas la force de m'y mettre, puisque, je le sais déjà, mon esprit sera rempli d'elle et de ces jours passés auprès elle.
J'ignore comment va se passer notre première rencontre mais je sais déjà que ce sera merveilleux. Les mois passés à se parler tous les jours via internet, les mails, les textos, les conversations téléphoniques.. Ah mon dieu, sa voix, cette putain de voix qui me charme tant et me laisse songeuse. Son sourire me transcende et m'envoie direct au nirvana. Je suis folle dingue d'elle , même si je ne l'ai encore jamais vue en vrai, mais rien à fiche, je sais que ce que je ressens est bien réel.
Hop, je reprends mes esprits, je n'ai pas le droit d'être en retard et de rater ce fichu train qui me mènera à elle.
J'ouvre en grand les robinets de la douche et je n'attends pas qu'elle soit à la température désirée. L'eau est glacée. C'est ce qui s'appelle, au sens propre, prendre une douche froide. Effet immédiat garanti, mes yeux s'ouvrent d'un seul coup et ma bouche s'ouvre en cœur sous l'effet de surprise. Je temporise aussitôt manière de ne pas me transformer en bloc de glace. L'eau redevient vite agréable et je me laisse envahir par un profond bien être alors que des milliers de cristaux chauds à souhait se déversent sur mon corps.
La douche prise, je me précipite vers la cuisine. Dieu merci, il reste assez de café pour pouvoir prendre un petit déjeuner digne de ce nom, beurrer quelques tartines que je ne manque pas de charger plus que de raison de confiture de fraise. Oui ! j'adore la confiture de fraise, et alors ?? La sonnerie stridente du micro onde m'annonce que mon café est prêt juste au moment où mes tartines sont prêtes.. Question timing, je ne pouvais faire mieux.
Je me sers un grand verre de jus d'orange... rien ne vaut celui que l'on se prépare soi-même, pas vrai ? Le moment du petit déjeuner est pour moi un instant sacré. Je me délecte de la senteur de l'arôme qui se dégage du précieux liquide noir et qui envahit tout l'appartement. J'ai décidé de ne pas faire griller mes tartines cette fois-ci. Cela aurait été une perte de temps et j'aurais du, nettoyer l'appareil et les cochonneries qui découlent de ce type d'opération. Ma maniaquerie m'aurait poussée à tout remettre en ordre, et là, je ne peux me le permettre. Trop pressée. Le café inonde mon palais de son goût si particulier et si délicieux. Surtout sans sucre, il est bien meilleur. Oui, je sais ce que vous allez me rappeler à l'ordre avec mes tartines. Ce n'est pas par crainte de prendre du poids, mais juste une question de goût, j'insiste. J'ai très faim et j'engloutis mes tartines. Je contrôle l'heure sur la pendule murale. 12H15. Je suis encore dans les temps. Soudain, je pense à elle. Seigneur, je n'ai pas regardé si j'avais des messages sur mon téléphone. Où est ce fichu appareil ? Je cherche partout dans la cuisine, je passe à la salle de bains et réalise qu'il est resté dans la chambre. Oui, mais où ? Je ne le vois pas à sa place habituelle. Je panique un instant, puis, sourire aux lèvres, je me souviens m'être endormie avec. Le soir, dès qu'elle s' endort, j'aime lire tous ses messages avant de la rejoindre au pays des songes, regarder son doux visage. Je m'en saisis et mes yeux fixent l'écran, ronds comme des billes. J'ai reçu pas moins de 30 textos.. 1 de maman, 5 de ma meilleure amie, 24 de Justine. « « Coucou mon amour, bien dormi ? » ». « « Hâte de te serrer dans mes bras. Le temps va me paraître bien long avant que tu ne sois là » ». « « Chérie?Tu dors toujours ? N'oublie pas, tu as un train à prendre ! » ». « « Sand, qu'est-ce-que tu fabriques ? » ».. « « Tu dors toujours mon ange ? » ». « « hey réveille toi mon coeur » ». « « Tu me manques tant » »... Telle que je la connais, elle doit être dans tous ses états et je la comprends, ça fait plus de deux heures qu'elle attend ma réponse. Je m'empresse de lui répondre : « « Bonjour mon amour. Je suis prête, je file à la gare. Ai passé nuit blanche. Viens juste de me réveiller. Tu me manques. Je t'aime chérie. Hâte de te serrer contre mon coeur» ».
Je lave mon mug, ramasse les cochonneries sur la table et file à la salle d'eau pour rafraîchir ma bouche et faire ce que j'aime à appeler « un ravalement de façade » : un peu de mascara pour ressortir le vert de mes yeux, un peu de fard à joues pour rehausser mon teint peau de pêche et un gloss discret. Je déteste ressembler à un pot de peinture et loin de mois l'envie de faire de la publicité pour Ripolin.
Hop, j'éteins la lumière, ciao salle de bain ! Je fais le tour de l'appartement, ferme tous les volets... oh zut ! La valise ! Je n'ai pas terminé ma valise ! Hop, direction la chambre, les talons font un bruit d'enfer sur le plancher.. Ce sont les voisins du dessous qui vont être contents.. Il ne me reste que quelques bricoles, des dessous, un petit caraco qui a séché cette nuit et auquel je tiens et qu'elle adore, mon veston en toile et hop, mes affaires de toilettes, dentifrice, brosse à dents, maquillage, parfum et le tour est joué.
13h15. Le train part dans une demie heure, j'ai intérêt à appuyer sur le champignon si je veux être dans les temps. Ceci dit, je n'ai que dix minutes de trajet, mais c'est à dix kilomètres de chez moi. Et oui, depuis qu'ils ont décidé de l'arrêt unique des TER, il me faut aller à la gare de la ville la plus proche.. J'espère juste que la route sera dégagée et que je n'aurai pas à subir l'opération « mille pattes » des bus qui pullulent dans la région pendant les vacances d'été. Je rêve alors, secrètement, à une voiture avec des ailes comme dans taxi 3 ou à celles, plus rigolotes, aux roues télescopiques qui permettent de passer par dessus les escargots des routes.. Gogo gadget aux roues.. il y a un peu d'inspecteur gadget qui sommeille en moi.. Je me marre toute seule et mes voisins ne manquent pas de le remarquer alors que je descends les escaliers. Heureusement que je n'habite qu'au second étage, je me demande comment j'aurais fait pour descendre une valise digne d'un départ pour le pôle nord.. L'ascenseur ? En panne, comme d'habitude. La petite mamie adorable du troisième qui m'invite souvent à boire un thé chez elle va trouver mon absence pesante.. Je l'ai prévenue de mon départ, je ne pourrai faire ses courses ou l'emmener pendant sept jours. J'espère qu'elle aura trouvé une solution. Cette charmante dame n'a pas son pareil pour mitonner un bon bœuf bourguignon qu'elle aime à partager avec moi dès qu'elle en prépare un. Il se dégage alors une odeur dans tout l'immeuble, je ne vous raconte pas.. Rien que d'y penser, j'en ai l'eau à la bouche.. Bon, Sandra, concentre toi, tu viens de déjeuner, non mais c'est quoi cette histoire, tu es un vrai estomac sur pattes ma parole !!
Oups, mes clopes.. j'ai oublié les clopes.. ah non, ça, impossible de partir sans mes clous de cercueil. Nerveuse comme je suis, il me les faut, il n'y a pas d'ultimatum ou je me transforme en croquemitaine et avec les quelques sept heures de train qui m'attendent, il est impensable que je m'en passe au risque de me retrouver en état de choc. Oui, je sais, il est interdit de fumer dans les trains, mais je resquille en allant m'en griller une entre deux compartiments. Fausse alerte, elle sont dans mon sac. Un paquet tout neuf dont l'espérance de vie ne dépassera pas la journée. Et la tablette ! Zen ! Elle t'attend dans la boite à gant de la voiture Sandra ! Tu l'y as mise pour ne pas l'oublier.. A ce moment même, je bénis le « au cas où ». Je n'aurais pu remonter aller la chercher.
13h20. Je soulève la valise pour la mettre dans le coffre.. Mais j'ai mis quoi là-dedans ? Des pierres ? Elle me semble très lourde tout d'un coup. Et en plus, depuis quelques dizaines de mètres, elle n'a cessé de partir dans tous les sens. Allez, un effort ma grande, tu vas y arriver.. Concentre toi, mais ne t' énerve pas.. Quoi que, la montée d'adrénaline ne me fera pas devenir toute verte, même si j'en ai besoin à ce moment précis. Monsieur Hulk, s'il vous plaît.. un petit coup de main ne serait pas de refus ! Je me concentre, attrape le fond de la valise et la soulève pour, enfin la mettre dans le coffre. Et là, je vois pourquoi ma valise s'était mis en tête d'imiter les crabes : j'ai perdu une roulette en cours de route ! Pas le temps de partir à sa recherche, je me débrouillerai quand j'arriverai et mettrai Justine à contribution.
Enfin derrière le volant, j'insère la clé et mets le contact. Rien. J'aurais compris que titine me fasse un caprice en hiver, mais en plein mois de juillet, il n'y aucune raison. Un souffle plus tard, je remets le contact. Titine a décidé de m'embêter aujourd'hui. Je connais cette putain de voiture comme si je l'avais faite puisque je l'ai donnée à mon frère qui me l'a prêtée car ma twingo dont j'ai explosé le compteur, est au garage. Je fais une nouvelle tentative. Rien. Mais c'est quoi ce plan, merde ! Tu vas pas me faire le coup de la panne ! Non pas maintenant hein ! Saloperie de voiture !! Il est 13h25. Je commence à paniquer lorsque, soudain, la réponse au problème surgit des profondeurs de mon cerveau en ébullition. Le coupe-circuit ! C'est vrai ! Je n'y ai plus pensé et ça n'est pas faute à mon frère de ne pas l'avoir dit ! Sous le siège, je trouve la source de tous mes malheurs et fait pivoter sans douceur la vanne quart de tour. Je mets le contact et oh, miracle, le moulin se met à tourner.
Je me dis qu'à cette heure ci, tout le monde finit de déjeuner et que les rues seront dégagées. Marche arrière d'enfer, dans une nuage de poussière qui englobe les pauvres gamins qui jouent dans le bac à sable du terrain de jeu, juste derrière moi. Première, et hop, c'est parti mon kiki.Je parcours une cinquantaine de mètres, personne, je grille le stop et me voilà sur la route principale. Virage à droite, et direction la gare. Je ne me suis pas trompée, il y a peu de trafic et je pense que je vais être dans les temps. Il le faut, c'est une question de vie ou de mort.
13h30, je suis sur la nationale, j'ai encore un quart d'heure devant moi. La gare est à l'extérieur de la ville, j'ai mes billets de train, commandés sur internet, que je n'ai plus qu'à composter, c'est tout bénef. Je prie Saint-Christophe pour ne pas aller faire un tour dans les décors et pour que la route soit dégagée de tout véhicule susceptible de me gêner pendant le trajet.
Gentil petit Christophe exauce mes prières et il ne me faut que cinq minutes pour parvenir à destination. Une place de parking me tend les bras, je m'y engouffre. Je descends à toute vitesse, récupère la valise tant bien que mal et ferme le 4x4. Toi, et ton coupe circuit, je te retiens !
Je fonce à l'entrée de la gare, traverse le hall en un coup de vent et composte mon billet avant de me précipiter sur les quais. Un coup d'oeil rapide sur les écrans et je repère la voie où mon train m'attend. Quai A, super, je n'ai pas à aller bien loin. Je repère mon wagon et m'y engouffre aussitôt. Les portes automatiques se referment derrière moi. Il était moins une ! Le lourd convoi se met à trembler et démarre. Je souffle un bon coup et avance dans l'allée, à la recherche de la place qui m'a été assignée. Je déambule tant bien que mal avec ma valise à roue unique et arrive à mon siège. Je me félicite intérieurement lorsque je constate qu'il s'agit d'un coin à quatre places, je pourrai ainsi étaler mes jambes. Mais un souci se pose à moi. Il me faut mettre la valise sur le porte bagages dans le rail du dessus et je sens que je suis mal barrée. A bout de souffle et de force après ce marathon express, je vais m'en voir des pierres. Prenant mon courage à deux mains, je me lance dans l'aventure. Cette valise est décidément trop lourde, jamais je n'y arriverai. Me voyant dans la difficulté, une bonne âme agrippe ma valise et de ses bras saillants, hisse le lourd fardeau jusque dans sa place. Un homme d'une trentaine d'années, certainement un adepte de la muscu a volé à mon secours, et vu son sourire et la façon dont il me dévisage, il mise sur sa plastique pour me faire du gringue. Je le remercie gentiment et m'installe enfin. Je mise sur la disparition immédiate, comme par un tour de magie, de la disparition du monsieur, mais je réalise que je vais devoir supporter sa présence lorsqu'il s'assoit juste en face de moi, un sourire d'abruti sur son visage ingrat. Je sens que ça va être folklo. Petit Jésus, faites qu'il descende au prochain arrêt ou ça va pas le faire. Vu l'éclair d'intelligence que je devine dans son regard et les pensées qu'il anime tant il est fin, je sens que je vais passer un bon moment..
Avant que ce monsieur n'entame une conversation que je sens lourdingue, je plonge la main dans le sac – l'expression la plus correcte serait foutoir - et en ressors la tablette que j'ai manqué d'oublier dans la boîte à gants. J'attrape mes oreillettes, les branches, les colle dans mes oreilles et l'allume. La lecture ne me tentant pas pour le moment, j'opte pour un film.. Mais lequel ? Je prends mon téléphone et compose le numéro de ma chérie qui doit être encore en pause. J'ai trop envie d'entendre sa voix. Elle ne va pas tarder à reprendre, mais ces quelques minutes passées avec elle me feront un bien fou avant d'affronter les 700 km qui me séparent d'elle. Je compose son numéro que je ne connais que trop bien et je n'ai même pas le temps d'entendre les sonneries qu'elle décroche déjà. C'est fou ce que le type en face moi est discret, je le vois tendre l'oreille. Toujours ce sourire d'arriéré aux lèvres.
« Coucou mon amour ! M'entends -je dire de cette voix qui me laisse à chaque fois sur le carreau
- coucou ma chérie ! » Je la tiens ma solution ! Si ce gars comprend que je suis lesbienne, il me foutra peut-être la paix. Je hausse le ton pour être sûre qu'il entende bien.. au risque que tout le wagon en profite.
- Ca y est, je suis dans le train.. J'ai failli ne pas arriver tu sais. Désolée, je n'ai même plus eu le temps de t'envoyer de message, ça s'est joué à la minute près ! Tu vas bien ?
- Ca ira mieux quand tu seras là. Je ne tiens plus en place mon ange. Je sais pas comment va se passer cet après midi, mais ça risque d'être long et moi d'être intenable !
- Il va falloir rester zen ma chérie sinon, tes élèves vont te prendre pour une dingue !
- Dingue de toi oui ! Dépêche toi d'arriver !
- Tu veux que j'aille demander au conducteur d'aller plus vite et de ne pas s'arrêter dans les gares ma chérie ? » Je l'entends rire à l'autre bout de l'appareil et elle reprend sur un ton beaucoup plus sérieux que le mien.
- Hâte que tu arrives, j'ai tant envie de te serrer dans mes bras.
- .. et moi de poser mes lèvres sur les tiennes chérie. »
Nous échangeons encore quelques minutes et j'entends la sonnerie annonçant la reprise des cours, ce qui met fin à notre conversation. Le sourire sur le visage du gars s'est figé et son regard est devenu interrogateur. De but en blanc, il s'adresse à moi.
« C'est votre petite copine ?
- Oui ? Pourquoi ? Ca vous dérange ?
- Non non, mais je me suis toujours demandé comment des femmes peuvent aimer des femmes
- Ou plus directement, comment on peut se passer des mecs, dites le.
- Oui, si on veut.
- Vous pensez sincèrement que votre outil est l'instrument sine qua non pour procurer du plaisir à une nana ?
- Oui, si on veut.
- Donc, vous êtes du style à rentrer dans le jardin et labourer sans avoir pris soin de préparer le terrain..
- Oui, si on veut répond il de son air abruti. La teub, ya que ça de vrai. Les nanas ne peuvent pas se passer de la mienne. Un vrai braquemard. Lance t il en éructant bruyamment.
- Et vous croyez que parce que la nature vous a doté d'un attribut conséquent, vous allez me convertir ? Beurk, ce type est franchement dégoutant.
- Oui si on veut. Je ne perds pas espoir.
- Et bien, vous vous fourrez le doigt dans l'oeil. - mon dieu, que n'ai-je pas dit et il répond du tac au tac.
- Ta copine te l'y met bien, pourquoi je tenterais pas ?
- Aucune chance ! » Vu les relents qui m'arrivent au visage alors qu'il se frotte la panse tout en éclatant de rire, je devine que ce gars n'a pas bu que de l'eau au déjeuner.
La discussion prend une tournure qui me déplaît. Je ne sais plus comment réagir face à cet individu. La probabilité veut que j'avais une chance sur 500 de tomber sur un type de cette trempe, j'ai trouvé le moyen d'y tomber dessus. Je coupe court, ne prend même plus la peine de lui prêter la moindre attention et me concentre sur la tablette.
« Tiens, un petit « Armagedon » avec Bruce Willis. J'ai déjà vu ce film des dizaines de fois mais je me régale toujours autant à chaque fois.
« Je peux regarder avec vous ? - Mon dieu, il revient à la charge ! Mais quel gros naze !
- Non, la tablette n'est pas équipée pour une seconde paire d'écouteurs.
- Allez quoi.. ! Je me mets à côté de toi et tu mets le son à fond !
- Bon, ça suffit maintenant. Foutez moi la paix. Cuvez votre bière et allez voir ailleurs si j'y suis !
- Oh, t'es pas sympa toi ! T'as pas une petite envie là ? T'as pas envie d'un petit calin ? Si, je suis sûr que si.. Allez, fais pas ta mijorée ! »
Le type parle à voix haute et commence à s'énerver. Tant et si bien que tout le wagon est ameuté ; Je ne sais plus où me mettre. Les passages commencent à chuchoter et à regarder dans notre direction, d'un œil pas tout à fait clément. Le gars se lève et vient s'installer à côté de moi, non, se coller à moi avant de commencer à me peloter. Contre la fenêtre, je n'ai aucun échappatoire. Quelle journée de merde !! Mon téléphone se met à vibrer. Je lis sur l'écran « Mon amour ».
« Encore elle ? Elle peut pas te lâcher la grappe ? Allez, viens, on va s'amuser tous les deux ! »
Ca devient franchement insupportable. Je me dis que j'aurais du laisser la valise dans l'allée . Là, je suis sûre qu'avec l'adrénaline qu'il m'a fait monter, j'aurais eu la force de l'attraper et de la lui balancer dans la tronche.
A cet instant, un homme en uniforme s'approche de nous et s'adresse à la sangsue puante juste à côté de moi.
« Monsieur, veuillez me suivre s'il vous plaît.
- Bah non pourquoi ? Je suis très bien où je suis !
-Votre comportement perturbe les passagers et surtout Madame. Je ne le répeterai pas deux fois.
-Ok, c'est bon, j'arrête ! Je recommencerai pas, promis !
- Veuillez me suivre, j'ai dit. »
Le pochetron n'a pas le temps de dire ouf que deux bras puissants l'arrachent de son siège et l'invitent sans douceur à se diriger vers la porte de sortie. L'homme en uniforme aux couleurs de la compagnie des chemins de fer s'enquiert de mon état et entraîne mon agresseur sexuel imbibé hors de ma vue. Et bien, mon voyage commence bien ! J'en suis toute retournée. Je me jette sur le téléphone et réponds au message de Justine. J'omets de lui parler de l'incident, de peur de l'inquieter. Je vais en avoir des trucs à lui raconter !! Ils laissent monter n'importe qui la SNCF ! Je me remets peu à peu de mes émotions et me reconcentre sur ma tablette, espérant que le reste du trajet se passera sans encombre. J'ignore ce qu'ils vont faire de lui et ce qui va lui arriver, mais c'est le cadet de mes soucis !
Dieu que le temps passe lentement ! Les deux heures que durent le film m'ont bien aidée mais je ne suis pas encore à la moitié du voyage. Justine va bientôt quitter le lycée où elle enseigne et s'appreter à venir me récuperer à la gare. Je l'imagine alors en train de se pomponner, d'hésiter sur sa tenue vestimentaire, regarder l'heure toutes les 30 secondes comme si elle faisait une course contre la montre.. je la vois arranger son appartement.. si si, plus maniaque que moi, ça existe. Je ferme les yeux et visionne notre rencontre. Je me laisse bercer par les légeres secousses sur les rails et peu à peu, l'image de ma dulcinée m'apparaît. Splendide, sa blonde chevelure et son sourire enjôleurs et ses yeux si expressifs mais si rigolos quand ils s'amusent à balayer l'espace. D'ailleurs, je la taquine assez souvent à ce sujet. Je la vois s'animer, s'approcher de moi, mains en avant, elle vole dans l'espace de mon rêve, car, oui, je finis par m'endormir du sommeil du juste.
« Well, you can tell by the way I use my walk, I'm a woman's man: no time to talk. Music loud and women warm, I've been kicked around since I was born. And now it's all right. It's OK. And you may look the other way. We can try to understand the New York Times' effect on man. » (Oui, tu peux le voir rien qu'à ma façon de marcher, Que je suis un homme à femmes : pas de temps pour parler. La musique est forte et les femmes sont chaudes, j'erre sans but depuis ma naissance. Et maintenant tout va bien, c'est bon.Et tu peux faire semblant de ne pas remarquer. Nous pouvons essayer de comprendre l'effet du New York Times sur l'homme.
Hein, quoi ? Qu'est-ce-que c'est ?? Les Bee Gees dans le train ? Y'en a un qui est revenu d'entre les morts ou quoi ? C'est quoi ce traquenard ?? Je me laisse entraîner par la mélodie de « Saturday night fever » encore quelques instants avant de réaliser que c'est mon propre téléphone qui sonne.
« Mon cœur ?
- Oui chérie.
- Qu'est-ce-qui se passe ? Je t'ai envoyé plein de textos tout mimis et tu as pas répondu, tout va bien ?
- Oui, heu, désolée, je m'étais endormie.
- Je crois que j'ai eu le nez fin de t'appeler, tu descends à la prochaine station..
- Oh punaise.. oui, tu as bien fait. J'ai bien failli atterrir à Pétaouchnok ! Merci mon amour.
- Ah, qu'est-ce-que tu ferais sans moi !!
- Rien, je ne suis rien sans toi ma chérie. Je t'aime tu sais.
- Tu as du me le dire un million de fois mais j'adore te l'entendre dire bébé.
- Et j'adore te le dire chérie.
- Allez, je te laisse.. et n'oublie pas de descendre au prochain arrêt ma belle au bois dormant.
- Oui, à tout à l'heure chérie. Je t'aime
- Moi aussi je t'aime. Bisous »
Une demi heure et 21 textos plus tard, mon train arrive enfin à destination. L'entrée en gare se fait à une lenteur insupportable. Mon Dieu, elle est là, elle m'attend.. Ca va ? J'ai pas trop l'air endormi ? Et mon maquillage, j'espère que c'est pas les montres molles de Dali.. Pas envie de lui faire peur à Justine. Les mètres sont comme des kilomètres.. Ils font une opération escargot ou quoi ? Et l'autre derrière, celui qui a ronflé en début de trajet, il me souffle dans le cou. Comme s'il faisait pas assez chaud ! Ha, je déteste ça !
Dans un dernier grondement infernal et un bruit métallique, le convoi s'arrête enfin. Les portes s'ouvrent, enfin, un peu d'air ! Et une urgence à satisfaire.. ou plutôt deux ! Je descends enfin, heureuse de respirer l'air extérieur. Je m'étire et balaie la gare du regard. Je repère l'escalier qui me mènera au hall où elle m'attend. La vache ! Ils auraient du le faire encore plus haut ! Comme si j'avais pas fais assez de sport aujourd'hui ! Mais elle est là et je monterais à reculons, à cloche pied et les yeux bandés s'il le fallait. Je prends mon courage à deux mains.. Je devrais rajouter les pieds et les jambes, parce qu'il va falloir les monter toutes ces marches !
Je m'approche, prends une grande inspiration et je me lance.. avec cette satanée valise. Mon cœur bat la chamade, j'ai l'impression qu'il va sortir de ma poitrine. Je sais qu'elle est là, qu'elle m'observe mais moi, je ne parviens pas à la voir au travers des immenses vitres teintées. Comment me trouve-t-elle ? Est-ce que je ne vais pas la décevoir ? Je fais quoi, un bisou sur la joue ou je l'embrasse ? Est-ce que je suis bien habillée ?
Mine de rien, je suis déjà en haut. Un escalator et une porte me séparent d'elle. Ca se voit que je suis nerveuse ? C'est pas un cœur qui bat dans ma poitrine, c'est tout un défilé de chars d'assaut du14 juillet ! Me voilà au bout de l'escalier mécanique, plus que quelques mètres à franchir pour parvenir jusqu'à la porte et... merdum, qu'est-ce-qui se passe encore ? Ma valise ne veut plus suivre. Elle est prise dans les dents des marches de métal. Je me débats, rien à faire, elle résiste. Je tire un coup sec et je réussit à la dégager et là.. je déplore la perte de la seconde roue. Il ne me reste plus qu'à porter a mano ce lourd fardeau. J'espère que Justine n'a rien vu, mais j'en doute. Et mes craintes sont fondées lorsque, à travers les vitres, je vois un joli croissant de lune blanc s'agrandir. Justine se paye ma tête.
J'ouvre la porte et... elle est là. Je plonge mes yeux dans les siens, on se dévisage du regard, regard pétillant, regard heureux, regard débordant de bonheur, regard rayonnant mais aussi intimidé.
« Salut ma chérie
- Bonjour toi !
- Qu'est-ce-qu'elle t'a fait cette pauvre valise.
- Elle s'est battue, elle a perdu.
- Tu as fait un bon voyage ?
- Long mais ça en valait la peine. »
Nous tombons dans les bras l'une de l'autre et nous nous serrons très fort, les larmes aux yeux. Son odeur de vanille me transporte, son corps contre le mien, enfin, m'emmène dans un pays magique.
« Tu viens ? La voiture est pas loin.
- Heu, il faut que j'aille saluer Madame Pipi, je ne tiens plus là.
- Ok mon cœur, viens, c'est par là.. »
De Madame Pipi il n'y a pas, ni même personne d'autre d'ailleurs. Justine me prend dans ses bras, son regard infiniment doux m'enveloppe et mes jambes se transforment en guimauve lorsque pour la première fois, nos lèvres se scellent. L'endroit n'est pas l'idéal, mais personne ne viendra nous embêter. Au diable le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse. Je lui rends son baiser et serre ce corps encore plus fort contre le mien, ce cors que j'ai tant caressé du regard.
« Si tu savais combien j'ai attendu ce moment mon ange !
- Oui, car je l'ai attendu autant que toi. Enfin, je peux te toucher et t'embrasser.. C'est juste.. magique. »
Nous nous dirigeons d'un pas rapide vers la sortie, puis jusqu'à sa voiture garée non loin de là. Je m'en réjouis. Déjà, de grosses gouttes d'eau commencent à tomber et des éclairs zèbrent le ciel. Le vent se lève, un gros orage s'annonce. En fait non, il est déjà dessus. Le temps que l'on arrive à la voiture, on prend la saucée. On balance la valise dans le coffre et on s'engouffre dans la voiture, trempées comme des soupes.
On se regarde, on éclate de rire avant de se donner un baiser langoureux, puis un autre, et encore un autre.
« On reste là où on va déguster le bon repas que je nous ai préparé ? M'interroge-t-elle.
Attends encore un peu. Approche toi. Je n'ai pas encore reussi à déterminer le goût de ton rouge à lèvres. »
Nous voilà parties, direction son appartement situé à quelques kilomètres de là. Elle est concentrée sur la route. Les essuie glace ne vont pas assez vite pour chasser l'eau qui tombe à présent en trombes. Je caresse sa joue du dos de la main, elle tourne un peu la tête et embrasse mes doigts.
Pour notre plaisir, on prend tous les feux rouges auxquels on patiente en se dévorant le visage.
15 feux plus tard, on est arrivées. La pluie ne s'est pas calmé, ça pète de partout. On va encore prendre une douche forcée. Mais on la prendra à deux. On investit rapidement l'entrée de l'immeuble et fonçons comme des fusées jusqu'à l'ascenseur qui devient à son tour le témoin privilégié de notre amour.
Ca y est, la porte se ferme, nous voilà seules, et au sec.. Nous nous jetons dans les bras l'une de l'autre et laissons parler nos sentiments, nos envies. Nos mains se touchent, se caressent, s'étreignent, parcourent nos corps respectifs alors que nos lèvres se scellent dans un long et voluptueux baiser. Nous nous déshabillons respectivement et elle m'entraîne à la salle d'eau où une douche bienfaitrice nous accueille. On y est un peu à l'étroit mais pas grave, on est collées l'une à l'autre et le contact de nos peaux nous électrise. Nous continuons nos étreintes, nos baisers à en perdre haleine. Nos lèvres ouvertes se cherchent et se trouve pour se perdre à nouveau. Nous avons si soif l'une de l'autre qu'il nous faudra boire l'une de l'autre encore et encore pour l'étancher. L'eau est divinement chaude, mais la température monte très rapidement. Nous ne formons plus qu'une. Puis soudain, un cri en stéréo résonne dans la pièce.
« Putain, mais c'est pas vrai ! Le cumulus déconne encore ! Je vais tuer le proprio, ça fait deux mois que je lui dis qu'il foire et il a toujours pas bougé son gros cul. Je suis désolée mon amour. Viens, allons nous sécher » Je la regarde, elle me regarde. On éclate de rire. On sort de la douche, et on se sèche tendrement en se donnant des bisous à tout va. Il fait meilleur tout à coup. Je vais jusqu'à ma valise, restée au milieu du couloir et attrape de quoi me vêtir.
« Tu as faim mon ange ?
- Oui, de toi.
- Je serai ton dessert si tu le veux bien. Allez, on va se restaurer, et j'ai une envie monstre que tu me racontes tes péripéties.
- Je sais pas ce que tu as préparé, mais ça a l'air bon » dis-je alors qu'elle apporte un plat bien garni.
- Rien de particulier, je suis une piètre cuisinière. Je me suis pas trop cassée la tête
- Arrête, je te crois pas. Je suis sûre que c'est très bon. Tu as fait quoi ?
- Des brochettes campagnardes : tomates cerises, olives noires, cubes de fromage, rosette, coeurs de palmier et des petits morceaux de pain aillé grillés. C'est tout.
- C'est tout ? Mais y'en a pour un régiment ! Et en plus j'adore ça. Merci ma chérie. Ah ! Et heu.. n'oublie pas ta promesse !
- Quoi donc ?
- Pour le dessert !
- Tu perds pas le nord toi !!!
- Jamais. »
Elle me sert un petit vin rosé bien frais. Elle n'a pas oublié ma préférence pour les vins, elle est adorable. Puis se sert à son tour. Nos verres se cognent et nous buvons une gorgée après avoir entrecroisé nos bras. Et à ce moment crucial, qui donc trouve le moyen d'avaler son rosé de travers et manque de s'étouffer ?
Justine trouve immédiatement les gestes rassurants en posant mon verre et en m'aidant à rétablir l'ordre dans mon organisme. Mais je ne renonce pas pour autant à goûter à ce délicieux nectar. Elle me tend mon verre avec son sourire inimitable et s'approche de mon visage afin de m'offrir ses lèvres..
J'ai faim.. très faim.. qui vais-je déguster en premier ?
- InvitéInvité
Re: Sacrée journée ! (récit court)
Sam 13 Sep - 14:17
Et les souvenirs remontent encore. Je me perds dans tes mots et me retrouve à la fois. Douce tempête dans laquelle je laisse la frêle coquille de noix qu'est ma vie se balancer de tous bords.
Merci, merci infiniment pour ces moments de bonheur.
Merci, merci infiniment pour ces moments de bonheur.
- mielpops
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Re: Sacrée journée ! (récit court)
Sam 13 Sep - 14:25
Angebleu, tes réactions me laissent sans voix.
Tu t'exprimes admirablement bien. N'écris-tu pas?
Tu t'exprimes admirablement bien. N'écris-tu pas?
- InvitéInvité
Re: Sacrée journée ! (récit court)
Sam 13 Sep - 15:47
Merci c'est gentil, mes réactions comme celles ci sont rares. Elles tiennent je pense au fait que tu écris avec ton coeur et ton âme. Peu d'écrits me font vibrer. Ceux qui le font sont éveil des sens et capables de me replonger dans mes souvenirs et voyager en même temps.
Je lis tes textes comme j'écoute de la musique. Tout y est harmonieux et important; des mots jusqu'au moindre silence. Tu réveilles chaque sens, tu es tour à tour musicienne, peintre, sculpteur, créatrice de parfums, et tu es une communicante.
Comment ne pas être sensible aux écrits qui éveillent vos cinq sens?
Pour répondre à ta question j'écris, du moins j'essaye. j'écris depuis que je suis en sixième. C'est pour moi une façon de libérer des émotions et de les transmettre.
Je lis tes textes comme j'écoute de la musique. Tout y est harmonieux et important; des mots jusqu'au moindre silence. Tu réveilles chaque sens, tu es tour à tour musicienne, peintre, sculpteur, créatrice de parfums, et tu es une communicante.
Comment ne pas être sensible aux écrits qui éveillent vos cinq sens?
Pour répondre à ta question j'écris, du moins j'essaye. j'écris depuis que je suis en sixième. C'est pour moi une façon de libérer des émotions et de les transmettre.
- mielpops
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Re: Sacrée journée ! (récit court)
Sam 13 Sep - 15:51
Encore une fois ton commentaire me touche au plus haut point!
Je n'ai pourtant aucune prétention. L'envie d'écrire m'est venue subitement il y a à peu près trois ans. J'avais déjà commencé à écrire avant mais juste des bribes car je trouvais nul ce que j'écrivais.
Je me suis mise à écrire après une séparation plus que douloureuse, qui m'a laissée sur le carreau. En fait, j'ai galéré pendant deux ans et je me suis mise à écrire "massage coquin", un petit texte que j'avais écrit pour Elle et que j'ai adopté ensuite à l'écriture.
Puis a suivi "nuit d'orages" un roman long que je mettrai sous peu dans ce forum. Très chaud.
Je n'ai pourtant aucune prétention. L'envie d'écrire m'est venue subitement il y a à peu près trois ans. J'avais déjà commencé à écrire avant mais juste des bribes car je trouvais nul ce que j'écrivais.
Je me suis mise à écrire après une séparation plus que douloureuse, qui m'a laissée sur le carreau. En fait, j'ai galéré pendant deux ans et je me suis mise à écrire "massage coquin", un petit texte que j'avais écrit pour Elle et que j'ai adopté ensuite à l'écriture.
Puis a suivi "nuit d'orages" un roman long que je mettrai sous peu dans ce forum. Très chaud.
- InvitéInvité
Re: Sacrée journée ! (récit court)
Sam 13 Sep - 16:12
Je suis heureuse que mon commentaire te touche car j'aimerais que tu te rendes compte à quel point tes écrits sont touchants et poignants. Je te respecte et sache donc que, comme toi pour moi, ce n'est pas un commentaire de complaisance et je n'en ferai jamais.
Je lis avec un plaisir infini tes écrits, parce qu'ils me bouleversent, quel qu'en soit la façon, que cela touche mes côtés sombres ou ceux où il y a de la lumière.
J'aime ce roulis, qui tel le ressac emmène des trésors et se retire enrichit par ce qu'il aura appris. Comme l'écrivait Beaudelaire: "Homme libre, toujours tu chériras la mer! La mer est ton miroir, tu contemples ton âme!"
Je lis avec un plaisir infini tes écrits, parce qu'ils me bouleversent, quel qu'en soit la façon, que cela touche mes côtés sombres ou ceux où il y a de la lumière.
J'aime ce roulis, qui tel le ressac emmène des trésors et se retire enrichit par ce qu'il aura appris. Comme l'écrivait Beaudelaire: "Homme libre, toujours tu chériras la mer! La mer est ton miroir, tu contemples ton âme!"
- mielpops
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Re: Sacrée journée ! (récit court)
Sam 13 Sep - 18:38
Tu vas finir par me faire rougir!!
Jamais je n'ai eu de tels retours sur mes modestes écrits!!
Jamais je n'ai eu de tels retours sur mes modestes écrits!!
- InvitéInvité
Re: Sacrée journée ! (récit court)
Sam 13 Sep - 18:43
Et bien il faut un commencement à tout et je suis sûre que le rouge aux joues te va bien
- mielpops
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Re: Sacrée journée ! (récit court)
Sam 13 Sep - 18:46
Mdr, et de l'humour en plus!
Le rouge aux joues oui, mais celui d'un bon bronzage.. et là j'en ai bien besoin!
Entre nous, j'adore voir quelqu'un rougir. Loin d'être un handicap, rougir traduit bien des émotions qui ravissent celle qui l'a provoqué
Le rouge aux joues oui, mais celui d'un bon bronzage.. et là j'en ai bien besoin!
Entre nous, j'adore voir quelqu'un rougir. Loin d'être un handicap, rougir traduit bien des émotions qui ravissent celle qui l'a provoqué
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